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jeudi 30 mai 2019

La gravitation


Qu’est-ce que la gravitation ?
En 1687, Newton réalise que les forces qui nous retiennent sur le sol, encore appelées « poids », ont exactement la même nature que celles qui font graviter les planètes autour du Soleil. La force gravitationnelle est cette force d’attraction qui s’exerce entre deux masses, et qui est à la fois proportionnelle au produit des deux masses et inversement proportionnelle au carré de la distance qui les sépare.

Mais si toutes les masses s’attirent, pourquoi ne voit-on pas le stylo posé sur cette table se rapprocher du gobelet qui s’y trouve ?
Parce que les deux masses, celle du stylo et celle du gobelet, sont faibles, donc leur produit également. Pour que les effets de cette force se fassent sentir, il faut qu’au moins l’une des deux masses soit considérable, correspondant à celle d’une planète par exemple. Notez au passage que les rôles joués par les deux masses étant interchangeables, la Terre attire autant votre corps que votre corps attire la Terre.

Si ces deux forces ont même intensité, pourquoi, lorsque je saute, est-ce moi qui retombe sur Terre, et non la Terre qui me suit dans mon mouvement ?
A cause de l’inertie, dont j’ai parlé dans ma précédente chronique : la même force suffit à modifier votre mouvement, parce que votre masse est faible, mais pas celui de la Terre, dont la masse est considérable.

Notre masse est-elle la même en tout point de l’Univers ?
Nous faisons généralement une confusion entre la masse d’un corps, qui est invariante et s’exprime en kilogramme, et son poids, qui est la force gravitationnelle qu’exerce sur elle une autre masse, et qui lui dépend du point où elle est située et s’exprime en Newton. Ainsi, une masse de 10 kg a sur le sol terrestre un poids d’environ 98 Newton, mais sur le sol lunaire, où l’attraction est six fois moindre, un poids de seulement 16 Newton. Notre pèse-personne serait donc déréglé si on l’installait sur la Lune, puisqu’il prétend mesurer une masse alors qu’en réalité il mesure un poids, et devrait être gradué en Newton : peu importe, puisqu’il est étalonné pour donner sur Terre une valeur de masse convenable ! Et il existe un point sur l’axe Terre-Lune, appelé point de Lagrange, où les forces gravitationnelles exercées par les deux planètes s’équilibrent : c’est à cet endroit, plus proche de la Lune que de la Terre puisque l’attraction lunaire est plus faible que l’attraction terrestre, que les fusées des missions Apollo devaient se retourner pour amorcer leur décélération, le risque n’étant plus alors de retomber sur Terre… mais de s’écraser sur la Lune.

Mais comment précisément peut-on s’arracher de l’attraction terrestre ?
Si vous lancez verticalement une balle de tennis à la vitesse de 100 mètres par seconde, soit 360 km/h, elle retombera dans vos mains. Si vous la lanciez à la vitesse de 1 km/s, c’est-à-dire dix fois plus rapidement, elle retomberait toujours dans vos mains. Mais si vous atteigniez une vitesse de 11,2 km/s, en négligeant toutefois les frottements dus à l’air, elle ne retomberait plus jamais sur Terre, mais serait embarquée dans un voyage sans retour vers les confins de l’Univers. Cette vitesse est la vitesse de libération de l’attraction terrestre au niveau du sol : c’est par conséquent celle qu’il faut communiquer à tous les lanceurs de satellites, de sondes ou de missions spatiales. Se libérer de l’attraction lunaire est plus aisé, et nécessite une vitesse de seulement 2,4 km/s, tandis que se libérer de l’attraction du Soleil nécessiterait une vitesse de 620 km/s ! Et si l’astre dont on voulait se libérer était tellement volumineux et tellement massique que la vitesse de libération excédait la vitesse de la lumière dans le vide, à savoir 300 000 km/s, même la lumière ne pourrait pas s’en échapper, si bien que cet astre demeurerait dans l’obscurité : c’est ce qu’on appelle un « trou noir ».

L’attraction permet également de se rendre plus facilement vers une planète ?
Oui, et l’on fait même mieux : envoyer une sonde en direction de Jupiter, la plus attractive des planètes du système solaire, alors que cette sonde est en réalité destinée à une autre planète, aux seules fins de bénéficier de son attraction, comme une embarcation qui se laisserait dérouter par un courant marin et, en dépit de ce chemin plus long, réaliser de substantielles économies de carburant : on appelle cela de l’assistance gravitationnelle.

(Emission "La chronique scientifique" sur Radio Notre-Dame, 29/03/2019)

vendredi 24 mai 2019

Jeanne d'Arc

"(…) La famille de Jeanne soutient le "roi de Bourges", le futur Charles VII. La situation militaire est en effet complexe : la guerre de Cent Ans fait rage, marquée par d'impressionnantes victoires anglaises (bataille d'Azincourt en 1415 et conquête de la Normandie en 1417-1419). Le roi anglais, Henri V, avait su jouer de la guerre que se livraient, au sein même du royaume de France, deux clans ennemis, les Armagnacs et les Bourguignons. Née d'une rivalité politique entre Louis Ier, duc d'Orléans, et Jean sans peur, duc de Bourgogne, la guerre civile avait débuté après le meurtre de Louis en 1407. Conséquence du cycle médiéval de la vengeance, Jean sans Peur fut à son tour assassiné en 1419 sur le mont de Montereau (…) Le geste poussait les Bourguignons dans le camp anglais (…)

Jeanne réussit à persuader Charles VII de se rendre à Reims pour être sacré, renforçant ainsi sa légitimité, liée non plus au seul sang, mais aussi à l'élection divine (…)

L'année des merveilles se termina brusquement le 8 septembre par l'échec devant Paris (…) Après les victoires obtenues, Charles VII disposait de nouvelles cartes pour négocier avec les Bourguignons une réconciliation qu'il appelait de ses vœux, négociations auxquelles Jeanne ne voulut jamais se résoudre.
Elle fit alors campagne dans le Nivernais, puis échoua en mai 1430 à libérer Compiègne dont les Bourguignons faisaient le siège. Prisonnière de Jean de Luxembourg, elle fut livrée aux Anglais qui choisirent Rouen comme lieu de détention et de jugement (…) Charles VII n'agit en rien pour la libérer. Il ne le pouvait par la force et n'entame aucune négociation au sujet d'une éventuelle rançon. Le but des Anglais était de la faire condamner.
Le procès de condamnation se déroula de janvier à mai 1431. C'est un procès pour hérésie mené devant un tribunal d'Eglise qui réunit - comme il est d'usage - un représentant de l'Inquisition et l'évêque du lieu, ici celui de Beauvais, Pierre Cauchon, diocèse dans lequel Jeanne avait été capturée. Jugée hérésie, elle n'eut pas d'avocat. Les deux principaux chefs d'accusation étaient le port de vêtements d'homme et les voix (…)

Mais Charles VII ne pouvait tenir son trône d'une hérétique, voire d'une sorcière. Aussitôt la capitale normande reconquise (en 1449), le roi décida l'ouverture d'un nouveau procès inquisitoire, en nullité. Il ne s'agissait pas de faire canoniser Jeanne - elle ne le sera qu'en 1920 - mais de prouver l'irrégularité du premier procès."

(Mureille Gaude-Ferragu, in "Jeanne d'Arc", Glénat-Fayard)

mardi 7 mai 2019

Paroles d'Evangiles

L’Evangile selon Saint Matthieu

Et si ta main droite est pour toi une occasion de péché, coupe-la et jette-la loin de toi […]

A qui te demande, donne, à qui veut t’emprunter ne tourne pas le dos […]

Oui, si vous pardonnez aux hommes leurs manquements, votre Père céleste vous pardonnera aussi …

« … lève-toi , dit-il alors au paralytique, prends ton lit et vas t’en chez toi. » Et il se leva et s’en alla chez lui. A cette vue, les foules furent saisies de crainte et rendirent gloire à Dieu d’avoir donné un tel pouvoir aux hommes.

Voici que je vous envoie comme des brebis au milieu des loups ; montrez vous donc malins comme les serpents et candides comme les colombes.

Alors il se mit à invectiver contre les villes qui avaient vu ses plus nombreux miracles mais qui n’avaient pas fait pénitence. «  […] Et toi Capharnaüm, crois-tu que tu seras élevée jusqu’au ciel ? Tu seras précipitée jusqu’aux enfers. Car si les miracles accomplis chez toi l’avaient été à Sodome, elle subsisterait encore aujourd’hui. Aussi bien, je vous le dis, le pays de Sodome aura, au jour du Jugement, un sort moins rigoureux que toi. »

… malheur à l’homme par qui le scandale arrive !

Si ta main ou ton pied sont pour toi une occasion de péché, coupe-les et jette-les loin de toi : mieux vaut pour toi entrer dans la Vie manchot ou estropié que d’être jeté avec tes deux mains ou tes deux pieds dans le feu éternel.

L’Evangile selon Saint Luc

A ces mots, tous dans la synagogue furent remplis de fureur. Et, se levant, ils le poussèrent hors de la ville et le conduisirent jusqu’à un escarpement de la colline sur laquelle leur ville était bâtie, pour l’en précipiter. Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin …


lundi 6 mai 2019

"Le droit à l'ombre"

"S'il est un trait qui caractérise notre époque, c'est bien la "conspiration contre toute forme de vie intérieure" qu'avait diagnostiquée Bernanos (…)

A l'époque de la tripe molle, le cœur doit s'exhiber en permanence (…) Paradoxe apparent : plus l'individualisme progresse, plus l'espace privé s'atrophie, au profit d'un règne du (…) privé spectaculaire (…)

Il est frappant de voir comme ce qui relevait hier de l'intime se retrouve aujourd'hui l'objet des discussions les plus politiques, débattu dans les parlements : la mort, le sexe et la famille, qui étaient autrefois des sphères échappant à l'emprise du droit et du marché. Procréation, euthanasie, harcèlement sexuel : ce qui relevait hier de la "vieille morale", comme disait Péguy, ou des "lois non écrites", comme disait Antigone, des coutumes et des us, de ce qu'on appelait les mœurs, sont aujourd'hui sous la coupe de la loi (…)

Dans la société de l'individu, la coexistence pacifique ne peut être assurée que par le droit, et le contrat remplace progressivement tous les habitus anciens (…)

"L'homme de demain aura-t-il le doit à tout sauf à l'ombre ?", se demandait Paul Morand qui se plaignait, à l'époque, des paparazzis. Il semble qu'avec le silence et le secret, l'ombre soit devenue une ressource rare du XXIè siècle."

(Eugénie Bastié, in Limite, mai 2018)

jeudi 2 mai 2019

"Jouir et punir"

Le paradoxe de la société libérale par Jean-Claude Michéa.
(Extrait d'un article d'Emmanuel Roux, in Limite, mai 2018)

"L'harmonie par le marché, la coexistence pacifique par le droit : tesl sont désormais les deux "opérateurs" qui font tenir une société d'individus rationnels et vont contribuer à dissoudre tous les facteurs traditionnels de sociabilité et d'auto-organisation collective. La civilisation libérale se définit donc par la foi dans la vertu sociale du droit et du marché (…)

Le marché pour les forts, le droit pour les faibles. Le marché comme règle sociale, psychologique, politique, le droit comme correctif (…)

Le flux de la jouissance est aussi libéré que le flux de la parole est scruté, disséqué, jaugé à l'aune de nouvelles catégories morales (…)

On s'arrête là pour la mise en évidence du paradoxe : notre civilisation vit sous l'injonction paradoxale d'une course à l'émancipation d'un côté et d'une pénalisation incessante de la vie sociale et civile de l'autre (…)

(…) le marché produit (…) la pathologie du "vivre ensemble sans autrui" selon l'expression de Jean-Pierre Lebrun (…) "there is no society" comme disait Margaret Thatcher. Vient le moment des identités collectives de substitution, sous le dehors rassurant mais trompeur des minorités dominées (…)

Alors vient la nouvelle guerre de tous contre nous. Si le droit incarne l'identité individuelle et collective (alors qu'il était censé permettre sa relation à l'autre), vouloir des droits, c'est assurer ma survie existentielle. mais dès lors que je constitue mon identité par le droit, ma singularité n'existe sur sur fond de différence affirmée (…) Je ne conquiers mon identité que "sur", "contre". C'est la juxtaposition des particularités qu'aucun universel ne vient rassembler."