Extrait d'un entretien du journal La Croix (26-27 novembre) avec Alain Tallon, Directeur de l'UFR d'histoire à la Sorbonne, spécialiste d'histoire religieuse
Comment caractériser l’empreinte du christianisme dans notre histoire ?
C’est vrai depuis le Moyen Âge. La sacralisation de la monarchie française n’a pas d’équivalent en Europe (…) Alors que la monarchie espagnole, depuis le Moyen Âge, est profondément laïque : le roi n’est pas sacré.
La sacralisation du pouvoir est-elle une particularité
française ?
Absolument, sur le mode chrétien (…) Le modèle de
Charlemagne a fait rêver tous les souverains français. C’est pourquoi
Henri IV a voulu se réconcilier avec Rome, au lieu de créer une Église
nationale sur le modèle anglais (…) Rome assure à la monarchie française ses
prétentions à l’universalité. La monarchie française se sent l’héritière
légitime de Rome par le fait que le roi est le premier des rois chrétiens. Et
donc toutes les prétentions universalistes de la France, qu’elles soient
politiques, militaires, intellectuelles, s’appuient sur l’idée selon laquelle
la France, comme premier royaume chrétien, reçoit l’héritage universel de Rome.
Cela explique notre goût partagé, jusqu’aux laïques, pour l’universalisme (…)
Plus tard, lors des conflits opposant le pape et l’empereur,
la monarchie française soutient la papauté face au pouvoir impérial. C’est l’un
des éléments importants de la construction de la monarchie française. Au XIVe et
au XVe siècle, la resacralisation de la monarchie a été un moyen de
reconstruction politique. L’épisode de Jeanne d’Arc en a été l’un des éléments,
qui s’est poursuivi à la Renaissance, avec un roi qui, comme François Ier,
se fait représenter en 1518 par Jean Clouet en saint Jean Baptiste… Les
ambassadeurs anglais racontent qu’ils ont été reçus par le roi, vêtu en Christ !
C’est tout à fait stupéfiant…
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