Saint Louis

"Sa mère, Blanche de Castille, joue un rôle décisif en assurant le gouvernement du royaume, selon le vœu de Louis VIII. Louis IX n'est reconnu majeur que vers 1235, et même alors, Blanche reste sa principale conseillère. Lorsqu'il part en croisade en 1248, il lui confie les rênes du pouvoir. A une époque où les femmes sont progressivement écartées du pouvoir royal, en particulier en France, Blanche représente une figure exceptionnelle.

Elle prend les décisions importantes concernant le royaume, comme le mariage de Louis avec Marguerite de Provence en 1234, qui est une autre dimension de la politique des Capétiens en direction du Midi (…)

Le roi de France n'exerce pas une autorité absolue sur son royaume au XIIIè siècle. Il n'a un contrôle direct que de ce qu'on appelle le "domaine royal", essentiellement l'Île-de-France et la Normandie. Dans le reste du royaume dominent des grands seigneur qui, bien que le reconnaissant comme souverain, peuvent rivaliser avec lui en puissance…

(…) en 1239, il avait acheté aux Vénitiens, qui la tenaient en gage de l'empereur byzantin, la couronne d'épines du Christ. Dans les années qui suivent, Saint Louis acquiert les principales reliques de la Passion et commence à édifier la Sainte-Chapelle pour les accueillir au cœur de Paris. Au même moment, en 1244, les Turcs prennent Jérusalem, rappelant aux souverains d'Occident la fragilité des petits Etats latins installés en Orient depuis la fin du XIIè siècle. Saint Louis, comme ses aïeux Louis VII en 1147 et Philippe Auguste en 1190, décide donc de prendre la croix et, après la consécration de la Sainte-Chapelle, s'embarque le 25 août 1248 au port d'Aigues-Mortes. Sa destination n'est pas la Terre Sainte, mais l'Égypte, qui est l'un des principaux bastions de puissance musulmane (…)

De retour en France (…) Louis développe le système judiciaire et l'organisation administrative des baillages et sénéchaussées (…) il dépêche des enquêtes sans tout le royaume pour contrôler les abus de ses officiers et, le cas échéant, rétablir ses sujets sur leurs droits. Il s'attaque aux jeux, aux blasphème, à la prostitution, et développe une politique anti-judaïque marquée par le port de la rouelle et la saisie des biens juifs, sous prétexte de lutte contre les usuriers, pour financer la croisade (…)

En 1258, il parvient grâce au traité de Paris à une paix durable avec Henri II d'Angleterre, mettant fin à des luttes qui duraient depuis la seconde moitié du XIIè siècle…

(…) le roi décide une nouvelle expédition en terre musulmane, cette fois pour prendre Tunis. Durant le siège, à l'été 1270, l'armée royale est touchée par une épidémie et le roi meurt le 25 août. Impossible à transporter, son corps est bouilli et ses ossements sont ramenés en France, occasionnant les premiers miracles "post mortem" rapportés par le procès en canonisation de 1297.

(…) Saint Louis ancre la dynastie capétienne dans un rapport privilégiée à Dieu et à l'Eglise. Largement entouré d'ecclésiastiques, en particuliers issus des ordres mendiants (dominicains, franciscains) en plein essor, son gouvernement fut largement inspiré par sa piété personnelle.

Louis se levait a nuit pour suivre les offices, se faisait donner la discipline le vendredi et pratiquait régulièrement le jeûne et la chasteté. Il avait un souci personnel des pauvres et des malades, et sa lutte contre la prostitution s'accompagna de la création d'établissements pour recueillir les femmes quittant le métier.

Son règne a été marqué par le développement d'un appareil judiciaire royal ambitionnant de se positionner au-dessus de la justice seigneuriale.

(…) se met en place la cour supérieure de justice du royaume, qui prend le nom de Parlement, et qui cherche à s'imposer comme une juridiction d'appel en dernier ressort.

C'est sous son règne que se fait l'intégration du Languedoc au royaume, ainsi que d'une partie des anciens domaines Plantagenêt dans l'ouest de la France. Le mariage de son frère Alphonse avec la fille du comte de Toulouse prépare de nouvelles acquisitions territoriales dans le Midi, dès 1271.

Un chroniqueur cependant permet de dépasser les stéréotypes, Jean de Joinville (vers 1225- 1317), compagnon du roi lors de la croisade d'Egypte, son conseiller et surtout son ami peut-être le plus proche. Son témoignage, consigné dans sa "Vie de Saint Louis" écrite du début du XIVè siècle, offre un point de vue très singulier sur le roi, vu par les yeux d'un proche…"

Valérie Theis / Etienne Ahneim (Glénat / Fayard)